J'aurais trois filles...
"J'aurai trois filles"... voilà ce que je m'imaginais depuis mon adolescence. Des enfants, j'en aurai, je voulais des bébés, je me voyais au milieu d'enfants, les miens. Des filles. J'élèverais des filles, elles seront trois, rapprochées, elles me ressembleront, un peu, peut-être beaucoup; elles auront les cheveux longs, je leur ferai des couettes comme quand j'étais petite, et puis une frange que je couperai moi-même. On fera des gâteaux et des crêpes, on s'achètera des robes toutes ensemble, je leur lirai des histoires de fées et je les observerai jouer à la poupée. Elles pousseront l'une derrière l'autre, main dans la main, mais pas toujours, elles seront curieuses et bavardes, elles tomberont amoureuses, se farderont... j'aurais trois filles.
Et mon petit garçon est arrivé. Dès que j'ai su qu'un petit bonhomme poussait dans mon ventre, je l'ai aimé. Il a juste suffi que je sache, quel visage mettre à ce bébé en devenir, quelle identité, et déjà il faisait partie de ma vie. Quand le médecin m'a dit "C'est un garçon", d'emblée j'ai été heureuse, j'ai été fière de donner un fils à celui que j'aime. J'allais désormais pouvoir murmurer au fond de moi, en caressant mon ventre : "Mon petit garçon, mon tout petit garçon, je t'aime, maman t'aime fort." Cette phrase, je la répétais souvent, à mon petit garçon en devenir. Je me disais que comme ça, il saurait dès sa sortie qu'il était attendu et aimé.
Je ne savais pas à quel point ce petit ange allait devenir toute ma vie. Au début, je craignais qu'un garçon, je ne sache pas l'aimer comme il faut, que je ne sache pas le comprendre. J'avais peur de ne pas être assez proche de lui, c'est vrai, les garçons, c'est différent des filles. Moi je ne sais pas trop les garçons, comment cela pense, comment ça aime qu'on les aime.
Et puis je l'ai eu dans mes bras, on s'est regardé et là tout m'a semblé comme une évidence : ce petit garçon, il allait m'aider à devenir sa maman, il allait m'apprendre ce que c'est, qu'être un petit garçon.